Le Sénégal doit répondre à de nombreux défis dont celui de la sécurité alimentaire qui rend incontournable l’agriculture et l’ensemble des acteurs de la chaîne alimentaire. C’est un secteur qui représente une part importante dans la création de richesse : une contribution de 9,6 % du PIB selon les travaux de l’ANSD (2022). L’agriculture a aussi une dimension d’inclusion sociale, car elle est un réservoir d’emplois pour des centaines de milliers d’hommes et de femmes. La pratique d’une activité agricole est ancrée dans les ménages sénégalais. Selon le rapport préliminaire du dernier recensement général de la population publié par l’ANSD (2023), elle concentre 908 628 ménages, soit 45,6 % des ménages du Sénégal. Dans ce contexte où l’agriculture occupe une place centrale tant sur le plan économique que social, la contractualisation apparaît comme un levier stratégique capable de structurer les relations entre producteurs et marchés, tout en favorisant un développement local inclusif et durable.
Tout d’abord, qu’est ce que la contractualisation entre la grande distribution et les producteurs agricoles ?
📘 Définition de la contractualisation
La contractualisation désigne un processus par lequel deux ou plusieurs parties formalisent un accord à travers un contrat écrit, précisant les droits, obligations et modalités de collaboration entre elles.
Dans le contexte de l’agriculture et de la grande distribution, la contractualisation agricole est un partenariat formel entre un producteur agricole (ou un groupement de producteurs) et un acheteur (comme une grande surface, un transformateur ou un exportateur). Ce contrat peut porter sur :
- les quantités à livrer,
- les délais de livraison,
- les normes de qualité exigées,
- le prix d’achat,
- les modalités de paiement,
Elle peut donner à un accompagnement technique ou logistique de la part de l’acheteur pour ses fournisseurs.
La contractualisation entre les grandes surfaces et les producteurs agricoles au Sénégal représente une opportunité stratégique pour structurer le secteur agroalimentaire, tout en posant des défis spécifiques liés au contexte socio-économique sénégalais. Depuis 2014, avec l’implantation de supermarchés comme Auchan et Carrefour, les rapports entre acteurs du commerce sont modifiés. La contractualisation peut être un levier pour intégrer les producteurs locaux dans les chaînes d’approvisionnement des grandes surfaces, à condition que cela soit encadré de manière équitable et durable.
⚖️ Enjeux et conditions de réussite
La contractualisation vise à établir des accords formels entre producteurs et distributeurs, garantissant des débouchés stables pour les agriculteurs et une qualité constante pour les distributeurs. Cependant, plusieurs conditions doivent être réunies pour assurer le succès de ces partenariats :
- Respect des engagements : Les deux parties doivent honorer les termes du contrat, notamment en ce qui concerne les délais de livraison, la qualité des produits et les modalités de paiement.
- Soutien aux producteurs : Les distributeurs peuvent fournir des intrants, des formations ou des services techniques pour aider les agriculteurs à répondre aux exigences du marché ;
- Flexibilité des contrats : Les accords doivent pouvoir s’adapter aux aléas climatiques, aux fluctuations des prix et aux autres imprévus qui peuvent affecter la production agricole.
🧭 Perspectives pour le Sénégal
Dans les lieux d’achat comme dans la grande distribution, l’approvisionnement en fruits et légumes est géré par des fournisseurs qui, à travers différentes formes de contractualisations, permettent aux acteurs de ravitailler leurs installations commerciales. Caractérisés par leur diversité et leur mode de fonctionnement, ces fournisseurs jouent un rôle vital dans l’approvisionnement en produits frais de la région de Dakar.
Pour que la contractualisation bénéficie pleinement aux producteurs sénégalais, il est essentiel, pour Auchan, Carrefour, les enseignes locales, ainsi que les pouvoirs publics de :
- Renforcer les capacités des agriculteurs : Des formations en gestion, en techniques agricoles et en négociation contractuelle peuvent les aider à mieux s’intégrer dans les chaînes de valeur.
- Mettre en place un cadre réglementaire adapté : Des lois et des politiques claires peuvent protéger les intérêts des producteurs et assurer une répartition équitable des bénéfices.
- Favoriser la transparence et la confiance : Une communication ouverte entre les parties prenantes est cruciale pour établir des relations durables et mutuellement bénéfiques.
Ainsi, la contractualisation peut être un outil puissant pour dynamiser l’agriculture sénégalaise, à condition qu’elle soit mise en œuvre de manière inclusive et équitable.
En guise de conclusion : que retenir de cette problématique au centre d’acteurs important dans la sécurité alimentaire ?
Face aux défis structurels du Sénégal, notamment celui de la sécurité alimentaire, l’agriculture joue un rôle fondamental à la fois comme moteur de croissance économique et comme pilier de l’inclusion sociale. Dans ce contexte, la contractualisation entre producteurs agricoles et grandes surfaces se présente comme un outil essentiel pour structurer les filières, sécuriser les revenus des agriculteurs, garantir l’approvisionnement des marchés et créer des partenariats durables. Notre démarche vise ainsi à éclairer et sensibiliser les consommateurs sénégalais sur ces enjeux cruciaux, afin de promouvoir une consommation plus responsable, porteuse de valeur ajoutée locale et de souveraineté alimentaire.
C’est en renforçant ces liens entre production, distribution et consommation que nous pourrons bâtir un système alimentaire plus juste, plus solidaire et plus résilient pour le Sénégal. C’est dans cette perspective que nous nous engageons à sensibiliser le consommateur sénégalais sur les enjeux liés à l’agriculture locale, à la contractualisation et à leur impact sur le développement économique et social du pays. Mieux comprendre ces mécanismes, c’est aussi encourager des choix de consommation plus responsables, qui soutiennent les producteurs nationaux et renforcent la souveraineté alimentaire du Sénégal.
Du supermarché au champ : la stratégie d’Auchan pour intégrer les producteurs sénégalais »
Avec ses au 45 magasins répartis dans 6 régions du pays, employant près de 2 300 collaborateurs, la politique de contractualisation d’Auchan Sénégal avec les producteurs locaux s’inscrit dans une volonté de renforcer l’ancrage territorial de l’enseigne et de répondre aux critiques sur son modèle importé. À travers le programme « Filière Auchan », l’entreprise met en place des contrats durables avec plus de 600 fournisseurs sénégalais, favorisant la traçabilité, la qualité des produits, et la professionnalisation des acteurs locaux. Cette démarche comprend aussi un appui technique et des formations, en partenariat avec des institutions locales, afin de structurer les filières agroalimentaires et les adapter aux standards de la grande distribution. Pour mieux connaitre la vison de ‘entreprise, Sen Retail vous propose trois pages de valorisation visant à mieux connaitre sa politique rse et de contractualisation avec les fournisseurs locaux.
Toutefois, ce modèle reste confronté à des limites, notamment en matière de logistique, de conservation des produits et de formation, ce qui complique une intégration fluide et durable des petits producteurs dans les circuits modernes.
Auteur : Malick MBOUP, doctorant et spécialiste de la grande distribution en Afrique