Dans un contexte de diffusion du modèle de grande distribution alimentaire (GDA) avec les enseignes comme Auchan, Carrefour racheté par EDK, la place des acteurs informels dans le système alimentaire reste à questionner. Des petits tabliers de quartiers aux grands commerçants des marchés urbains traditionnels, les acteurs de l’informel assurent un rôle important dans la distribution alimentaire en milieu urbain. Composés de profils différents, de toutes les catégories d’âges, ces acteurs assurent l’approvisionnement en produits alimentaires (fruit et légumes) des ménages. Premier poste de dépenses des ménages urbains, l’alimentation occupe une place importante dans l’atteinte du bien-être et constitue un critère discriminant entre les ménages.
Des acteurs du quotidien de l’offre alimentaire
Les commerces alimentaires dans les grandes villes africaines comme Dakar sont marquées des formes d’appropriation de l’espace public urbain. Marqué du sceau de l’informalité, ces activités de distribution sont cœur du circuit alimentaire et sont assurées par des acteurs qui facilitent l’approvisionnement des marchés urbains. Situés à l’aval de la chaine de distribution, les acteurs du commerce de détail dans l’espace urbain dakarois sont composés de « Coxeurs », de grossistes et semi-grossistes et des détaillants qui jouent le rôle d’intermédiation entre les producteurs et les consommateurs.
Les « Coxeurs » négocient dans les marchés traditionnels, à Thiaroye, Tilène, Sandiniery…, l’achat des produits maraichers en gros. Dans le seul marché de Thiaroye, près de 200 camions de légumes sont déchargés par semaine. Les « Coxeurs » en assurent le stockage et la redistribution vers les marchés secondaires de la capitale et du pays (jusqu’à ziguinchor). Ils constituent des relais importants des Bana-Bana en réceptionnant les spéculations agricoles provenant des grands bassins de production situés dans la zone de Niayes (Notto, Mboro, Fass Boye Mont-Rolland…) et au niveau du delta du fleuve Sénégal. Dans une logique pyramidale, les «Coxeurs » alimentent un réseau interconnecté, de grossistes, semi-grossistes jusqu’aux tabliers des marchés et des quartiers de Dakar. Ils forment ainsi un système interdépendant, tel un modèle arborescent, sur la base de relation de confiance. L’espace urbain constitue pour ces acteurs des lieux de construction d’une proximité relationnelle et géographique entre acteurs du système alimentaires.
Un modèle de proximité sur la base d’une relation de confiance
Si les grande distribution alimentaire (GDA) reposent sur des relations impersonnelles, le modèle traditionnel de distribution alimentaire, composé d’acteurs de l’informel, s’appuie sur une forme fidélisation des consommateurs et des distributeurs entre eux sur la base de relations de confiance. Les modalités de paiement par crédit constituent un des moteurs de la distribution de produits alimentaires, où le mécanisme relationnel de confiance vient en appui aux relations économiques contractuelles. Une proximité entre acteurs de l’informel qui assoie la base de la pérennisation du modèle distribution alimentaire traditionnel.
Malgré la présence de la GDA, le secteur informel continue d’irriguer le marché en produits alimentaires et consolide leur rôle d’acteurs majeurs du système alimentaire à Dakar. Malgré un contexte concurrentiel, ils participent aussi à la fourniture de biens alimentaire à la GDA.
Au final, le fait alimentaire est influencé par la disponibilité des produits et par l’existence et la nature des lieux d’approvisionnement alimentaires. Dans les grands centres urbains comme Dakar, les marchés urbains jouent un rôle central en tant qu’espace de centralisation, de distribution des ressources alimentaires. Ils participent ainsi à la diversification des offres alimentaires grâce à des canaux variés.
Article de sensibilisation réalisé par Pr. Ibrahima Faye DIOUF, Enseignant-chercheur au Département de Géographie de l’UCAD. Domaine de recherche : Études rurales, développement durable et gestion des ressources.
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