Environnement, changement climatique et collectivités territoriales : quelles nouvelles perspectives pour un développement durable ?

Introduction

Les inondations et les phénomènes de submersion marine constituent aujourd’hui l’un des défis environnementaux et socio-économiques majeurs auxquels sont confrontées de nombreuses collectivités territoriales au Sénégal. Ces événements, souvent dévastateurs, entraînent d’importantes pertes humaines, matérielles et économiques, tout en compromettant le développement durable des territoires. Face à ce risque naturel récurrent, les collectivités territoriales, en tant qu’acteurs de proximité, jouent un rôle central dans la prévention, la gestion et l’atténuation des impacts liés aux inondations. Leur responsabilité s’exerce à travers la planification urbaine, la gestion des zones à risque, l’application des règles d’urbanisme et la mise en œuvre de politiques publiques de résilience.

Outre leurs obligations en matière d’information, les collectivités territoriales jouent un rôle fondamental dans la prévention des inondations, tant en ce qui concerne l’urbanisation de leur territoire , que dans la mise en œuvre de leurs pouvoirs de police et d’attributions spécifiques , et qui peut conduire les communes à voir leur responsabilité administrative engagée.

Ainsi, la prévention et la gestion des inondations est inscrite en priorité nationale par l’État du Sénégal depuis 2006 (DSRP II).

Cependant, c’est en aout 2012 qu’un signal fort est lancé par le gouvernement du Sénégal : le Sénat est dissout et les fonds alloués à son fonctionnement sont transférés à la lutte contre les inondations. Dès lors l’État approuve le Programme Décennal de Gestion des Inondations (PDGI 2012-2022) présenté conjointement par les ministres en charge de l’hydraulique, de l’aménagement du Territoire et de l’Urbanisme et estimé à 700 milliards de FCFA.

Toutefois, force est de constater que malgré les efforts consentis par le Gouvernement du Sénégal pour la gestion de cette risque, le problème demeure comme le montrent ces images ci-dessous (inondations, rareté de l’eau pour le bétail et dégradation des habitations près des côtes).

Les collectivités territoriales butent devant bons nombres de facteurs à la fois naturels et anthropiques pour la résolution de cette problématique. Beaucoup d’experts essaient de proposer des solutions à ce phénomène mais ne faudrait – il pas au préalable en comprendre les origines?

Depuis quelques temps, des phénomènes extrêmes sont entrain de causer des effets dévastateurs dans le monde et les inondations en sont les plus marqués.

Certes classés comme catastrophes naturelles, les inondations au Sénégal relèvent en premier lieu d’un problème structurel : mauvais ou absence de système d’assainissement, occupation anarchique de l’espace, faiblesse de système fonctionnel de drainage des eaux pluviales dans certaines zones ou leur absence totale dans d’autres, occupations des zones non aedificandi(dépressions, bas-fonds, niayes, etc.), artificialisation du sol avec des matériaux imperméables.

Recommandations spécifiques

  • Promouvoir les constructions d’infrastructures plus résilientes pour réduire la vulnérabilité des établissements humains aux inondations côtières, à l’élévation du niveau de la mer et à d’autres facteurs de stress induits par le climat (Canalisation, aménagement de bas-fond, lotissement, etc.);
  • Aménagement des zones non inondables ;
  • Respect des plans d’aménagement du territoire afin d’éviter l’occupation de zone non aedificandi ;
  • Sensibilisation des populations pour la préservation des ouvrages de drainage des eaux pluviales afin d’éviter le dépôt d’ordures sur les caniveaux ;
  • Mise en place d’une cellule d’alerte et de veille dans chaque collectivité territoriale pour disposer des informations réelles sur les risques et vulnérabilités ;
  • Réalisation d’ouvrages structurants, efficaces et durables de drainage et/ou de stockage des eaux pluviales dans toutes les zones exposées aux inondations pour une bonne adaptation aux épisodes de pluies de forte intensité ;
  • Veiller au respect strict des plans directeurs d’urbanisme ;
  • Cartographie des zones à risque d’inondation pour identifier les zones dites non ædificandi et interdire leur occupation dans l’avenir puisque les mesures correctives sont très couteuses sans aucune garantie d’efficacité durable[1] ;
  • Le déplacement et la réinstallation progressive des populations sinistrées installées dans des bas-fonds sur des zones bien aménagées et équipées de réseau fonctionnel d’assainissement autonome et de drainage des eaux pluviales, offrant un meilleur cadre de vie ;
  • L’amélioration de la politique d’aménagement du territoire ;
  • La mise à contribution la DSCOS pour l’interdiction d’aménagement à usage d’habitat des zones non ædificandi sur l’ensemble du territoire ;
  • L’implication effective d’une masse critique de spécialistes et chercheurs du domaine pour la recherche de solutions durables ;
  • Le suivi régulier de la dynamique des zones basses (flux d’eau, niveau de la nappe).

Toute ces recommandations repose sur une bonne planification et un suivi régulier par les collectivités dont le rôle principal est d’assurer le développement durable de leur territoire.

Conclusion

La problématique des inondations au Sénégal met en lumière les limites de la gouvernance territoriale face à un risque naturel aux conséquences multiples. Si les collectivités territoriales disposent de compétences importantes en matière d’urbanisme, d’assainissement et de gestion des risques, leur action reste souvent entravée par des facteurs institutionnels, techniques et humains. La persistance des inondations traduit ainsi la nécessité d’un changement de paradigme : passer d’une logique réactive à une approche préventive et intégrée.

La mise en œuvre effective des recommandations proposées, telles que la cartographie des zones à risque, le respect des plans d’aménagement, la construction d’infrastructures résilientes, la sensibilisation des populations et la mobilisation d’expertises pluridisciplinaires, constitue un préalable essentiel. Ces actions, portées par une planification rigoureuse et un suivi constant, permettront de renforcer la résilience des territoires et de protéger durablement les populations.

En définitive, la prévention et la gestion des inondations ne relèvent pas uniquement de la compétence technique : elles incarnent un véritable enjeu de gouvernance locale, de responsabilité collective et de développement durable pour le Sénégal.


Article de sensibilisation réalisé par Mme Marieme NGOM, doctorante en Sciences et Technologies, coordinatrice/référente pays de la Fresque du Climat Sénégal et coordinatrice du Think Tank Ecoglobal Group


[1] Le Dr Labaly TOURE, directeur de Géomatica, a crée une application dénommée Innond’actions221, qui a pour objectif de collecter des données et produit des outils d’aide à la prise de décision concernant les inondations au Sénégal et dans la sous-région.


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